Encore quelqu'un pour me parler.

Invité may the lord open

Je reste figée face à la tante dans un silence religieux. Mince… J’aurais voulu vraiment arriver plus en retard pour l’éviter… Tout avait si bien commencé. Ou presque.

Insomnie, je m’étais levé avec les Martha si bien qu’en réalité j’avais passée une matinée entière dans la cuisine à… bah cuisiner. Du repas de midi à des mignardises, je n’avais pas bougé de l’endroit jusqu’à midi. Pour le midi j’avais fait un ragoût de bœuf, et en mignardises je m’étais amusée à en faire de toutes sortes, mais en petites quantités : macarons, éclairs, meringues, religieuses… Tout ce que j’avais put faire : je l’avais fait délaissant pour une fois mes toiles pour autres choses. J’avais même pu monter tous mes macarons, la ganache au caramel beurre salé étant prête depuis la veille. Après le repas j’étais allée faire une petite boîte de gourmandise pour Gethin que j’avais soigneusement emballé avant de me préparer à partir le plus rapidement possible : Je savais que l’une des tantes venait aujourd’hui et je ne voulais pas la voir. L’une des Marthas, Angela qui semblait m’adorer m’avait même donné un sachet de meringue pour que je n’aie pas faim. Et j’étais partie en « cachette » porter tout cela chez Gethin. Je savais bien qu’il n’était pas chez lui alors je l’avais laissé le sac pendu à la poignée de sa porte et j’avais pris le plus long chemin possible pour rentrer. En m’arrêtant pour regarder la moindre chose qui attirait mon regard plus de quelques secondes. J’aurais pu tenter d’aller au quartier ocre, mais ce n’était pas le jour et sur la route j’avais grignoté quelques meringues

J’ai mal calculé mon coup. Vraiment puisque Tante Cassandre est en face de moi. Je me mords l’intérieur des joues en la détaillant. Le marron ne lui va pas et j’ai envie de tourner les talons pour partir et la planter là. Je me demande quelle serait la réaction de ma mère. J’ai froid, mais je ne veux pas rentrer. Ma mère est à droite de la tante. Qu’est-ce qu’elle lui a dit ? Le discours habituel ? « Je n’y arrive pas avec ma fille ! Elle n’en fait qu’à sa tête et si elle obéit c’est toujours à contre-cœur. Non ce n’est pas qu’elle se rebelle, mais il faut tout lui expliquer et elle demande toujours des explications pour tout et n’importe quoi. Bientôt elle va me demander pourquoi on doit saluer les gens. C’est à se demander si parfois elle a une once d’intelligence. Et elle ne supporte toujours pas que je la touche sans lui demander si elle est d’accord. ». Je n’ai pas envie de la saluer cette tante parce que je ne veux pas lui parler, parce que je ne l’aime pas. Parce que si je lui dis bonjour ça veut dire que je veux bien lui parler. Cependant si je ne le fais pas… Je reporte enfin mon attention sur la tante et marmonne juste assez fort pour qu’elle l’entende.

« Bénis soit le fruit Tante Cassandre. »

Je remonte un peu mon écharpe. J’ai froid. Vraiment. Mais en même temps… Je suppose qu’elles sont sorties parce qu’elles m’ont vu arriver ? Je veux qu’on me fiche la paix !

Invité may the lord open

« Encore quelqu'un pour me parler »

@Grace Ward & @Tante Cassandre

Le bruit de ses talons résonnent contre le parquet lustré du Centre Rouge. Elle erre dans le petit bureau comme un fauve enfermé dans une cage. Sa mentor la regarde sans la lâcher une seconde des yeux. Cassandre veut sortir dehors et entendre le pépiement des oiseaux au lieu du ton neutre de Tante Iliana. Elle n'a pas compris la source de son inquiétude : bien entendu que Cassandre fera l'affaire, l'échec ne fait pas parti de son vocabulaire. Mais, la Tante a peur de se reconnaître dans cette femme qui a été peinte en blanc par Dieu lui-même. Elle a peur de se noyer dans ses souvenirs et de ne pas pouvoir remonter, pas sans lui. Son Gardien aurait les mots justes pour la petite. Cassandre était aussi curieuse qu'elle avant. Elle n'accorde pas non plus les privilèges du contact rapproché à tout le monde. Elle ferme les yeux et s'imagine perchée sur le bord de sa fenêtre. Elle est quelqu'un de bien d'après Aodhan.

<< - Bien, je m'occuperai de Grace Ward, Tante Iliana. >>

L'être perdu qu'elle est sensée remettre dans la lumière du Seigneur vit dans le quartier blanc comme la plupart des individus de bonne naissance de la République. Un quartier dont le nom lui colle à la peau et qui est encore plus blanchâtre que d'habitude. L'hiver a étendu son emprise sur la ville, la recouvrant d'un voile étincelant. Son souffle régulier forme de la buée tandis qu'elle marche d'un pas énergique vers la demeure des Ward. Heureusement, celle-ci n'est pas bien loin : elle est à l'entrée du quartier. Une maison austère qui dépasse d'une tête toutes les autres. Elle est également reconnaissable au blason ouvragé des Gardiens de la Foi qui ornemente le portail et le fronton. Sa main gantée se pose sur la grille de fer avant de la repousser. Elle n'est pas encore arrivée devant la lourde porte de bois que celle-ci s'ouvre sur une Martha.

<< - Bénis soit le fruit Madame Ward, je suis Tante Cassandre. >>

Elles s'installent toutes deux dans le salon, une tasse fumante de thé entre les mains. Le feu crépite dans la cheminée, son agréable lorsque vient le silence.Un silence apaisant qui succède à la logorrhée de la mère inquiète qui ne cesse de s'excuser pour le retard de son enfant. Elle sourit doucement la Tante qui ne l'a pas interrompu une seule fois. Elle se lève et pose une main maternelle sur l'Epouse bien qu'elle soit beaucoup plus jeune que cette dernière. Elle s'apprête à parler lorsque la Martha les appelle. La jeune Ward est de retour à la Maison. Cassandre suit Madame Ward jusque sur le perron et elles attendent là sans un bruit le retour de l'enfant prodige ou pas. Elle est silencieuse l'enfant mais la Tante est patiente. Et elle obtient cette première et insignifiante victoire, la formule rituelle marmonnée du bout des lèvres.

<< - Que le Seigneur ouvre Grace Ward. Madame Ward votre jardin est sublime. Vos roses ne sont pas encore gelées, Loués soit-Il puis-je le visiter ? >> demanda-t-elle d'une voix presque monotone.

L'Epouse hoche la tête devant la proposition incongrue de la Tante. Le froid se fait de plus en plus mordant mais c'est le seul choix qui s'offre à elle. Elle n'obtiendra rien de Grace Ward si la figure maternelle est dans les parages. Grace, seule doit décider si elle souhaite évoquer la conversation qu'elle aura eu ce jour. Elle ne tend pas son bras vers sa future protégée. Elle se contente de se diriger avec lenteur vers le jardin gelé. Elle sait que cette dernière la suivra. Cassandre n'est pas comme les autres mais elle n'est pas comme elle non plus.

DESIGN ϟ VOCIVUS // AVATAR (C) Dandelion & Perlman

Invité may the lord open

Cela ferait quoi si je pivotais des talons pour repartir loin d’ici ? Loin et en courant pour qu’on ne me rattrape pas. Je ne veux pas parler à la tante… Cela ne sert à rien. Que ce soit elle ou l’autre Tante Iliana cela va être toujours la même chose. Je décide pour l’instant de m’enfoncer dans le mutisme après avoir dit du bout des lèvres la formule de politesse. Je n’aurais pas dû… Mais je vois ma mère qui me fixe. Et si je ne le fais pas, elle va me casser les pieds pendant des heures. Je n’ai pas envie de faire cette conversation. Si je me tais, peut-être qu’elle partira plus vite. Oui, oui c’est cela. Bénit soit le fruit que le seigneur ouvre. Niveau formule idiote… on en est là… Non, je ne suis pas de bonne humeur aujourd’hui.

Oui allons visiter le jardin gelé… Je rajuste mon écharpe pour cacher mon soupir. Elle risque de me perdre. On retrouve mal le blanc dans du blanc. J’aurais vraiment aimé rentrer, mais ma mère me bloque le passage et plus que soigneusement. J’ai compris que je ne couperais pas à cette stupide conversation avec une tante… Je rajuste mon bonnet et suis dans le silence le plus complet la tante en question. Cassandre… J’observe le jardin les lèvres serrées cachées derrière mon écharpe. Cassandre… Ce nom semble chargé d’histoire, la tante ressemble à une poupée. Et les poupées ont leur fait dire ce qu’on veut…

Mon regard est attiré par une petite boule de neige particulière. Intriguée je m’approche, oubliant, volontairement, la tante pour observer avec attention ce que c’est. Accroupis dans la neige, je regarde avec attention une rose tombée qu’a recouvert avec douceur la neige. Entre deux doigts je la soulève pour l’admirer dans les rayons du soleil que je vois entre les branches de l’arbre. La neige s’est glissé entre les pétales d’un rouge orangé et l’arbre recouvert de neige. Je reste immobile face à cette fragile beauté, tentant de graver l’image de la rose que la neige enlace posé sur un écrin de branches et de ciel, avec la lumière qui perce avec délicatesse ses fragiles corolles colorées. J’avance encore d’un pas et écoute le craquement de la neige sous mes pas avant d’accrocher la rose à mon manteau. Oh ! Une tache de couleur : je ne suis plus un fantôme !

Quelque chose s’envole de l’arbre et de la neige me tombe dessus. Je secoue la tête pour la chasser avant de revenir sur le chemin. Un corbeau, les plumes étaient noires. Je me refuse de parler, si elle veut sa conversation le pantin, qu’elle la fasse toute seule. J’ai décidé que je ne parlerais pas avec elle, ou que je ne parlerais pas tout court de la journée. Je verrais bien ce qu’il se passe. Je n’ai pas envie d’être gentille aujourd’hui. Il y a des jours comme ça…

Contenu sponsorisé may the lord open